Travailler avec les chinois : Oh my God !
Déjà plus de 2 mois que l’on travaille en Chine. Deux mois que l’on apprend à travailler avec les chinois. Car oui, c’est un apprentissage (douloureux) ! Les clichés sur le travail à la chaine de salariés soumis sont bien loin de notre réalité. Nous vous livrons ici notre ressenti et les constats que nous avons pu faire sur le travail en entreprise avec des chinois.
Les chinois face à l’urgence et à la pression
Cornucopia Ice Cream est une SMUD (small company ultra dynamique – Non ça n’existe pas pour de vrai). Et comme souvent, tout va très vite, la croissance est monstrueuse, et la structure doit s’adapter rapidement et se perfectionner pour pouvoir suivre la cadence.
>>>> Conséquence : c’est le rush non-stop, tout le monde est sous pression, et premier constat : les chinois gèrent assez mal la pression. Généralement, ils s’affolent pour des détails,et ne savent pas comment réagir face à l’urgence. La raison est souvent une peur de prendre une décision, de froisser quelqu’un, de prendre un risque.
En 2 mois, on a déjà eu le luxe de se confronter à une quantité de problématiques inestimables (tant en quantité qu’en qualité), à des situations délicates à gérer, à de nombreuses urgences, et à des meetings parfois houleux. Etre Sales Manager dans une entreprise de glaces, aussi excellentes soient-elles, c’est pas toujours aussi drôle qu’on le croit.
D’ailleurs, dissipons une idée-reçue : non, on s’empiffre pas de glaces et de sorbets tous les jours =) …
… Tous les 2 jours, plutôt 😉
Travailler avec les chinois, en quelques règles
– Se heurter à l’important Concept de Face et en comprendre les tenants et aboutissants
– Adapter sa façon de communiquer pour ne pas brusquer/effrayer/froisser (expliquer, démontrer, s’impliquer, montrer l’exemple)
– Découvrir les clefs du management asiatique (le consensus, le refus du conflit)
– Savoir mettre la pression tout en restant respectueux et bienveillant
– Ne pas croire que tous les chinois ont la même personnalité et réagissent de la même façon. (certains sont de vrais feignasses, d’autres de vrais râleurs, d’autres des gens d’extrême bonne volonté, d’autres sont soumis…)
## Ce que les chinois n’aiment pas, c’est qu’on les contredise. Et surtout, qu’on les contredise devant leurs collègues, ou pire, devant ceux dont ils sont responsables. Alors autant, nous autres les français avons déjà une certaine dose de fierté qui nous pousse pas toujours à admettre nos torts, autant les chinois, tu ne les feras JAMAAAAAAIS admettre qu’ils ont fait une erreur. Ou alors ce sera dans la souffrance. Le fameux concept de face.
## Si quelque chose de désagréable doit être dit, mieux vaut s’isoler, porte fermée, et discuter en tête à tête. Votre interlocuteur chinois sera beaucoup plus réceptif, et enclin à la compréhension de votre remarque.Réussir à s’adapter à la philosophie de travail à la chinoise, c’est grandir dans sa façon de travailler en équipe, savoir prendre sur soi.
S’affirmer au sein d’une équipe 100% chinoise. Pas une mince affaire !
>>>>> Sans s’étendre sur le détail de notre mission, le rôle qui nous est attribué est de « mettre un coup dans la fourmilière », de bouleverser leur façon de procéder, de soulever leurs problèmes organisationnels, d’apporter des solutions stratégiques, bref d’être les ambassadeurs des mots « rigueur », « procédures », « organisation », « précision ».
Alors vous imaginez bien que eux qui fonctionnent en mode système-D depuis 2 ans, ils ont beau être effrayés par les 100% de croissance/an, ils sont néanmoins torturés entre se dire
« ah cool, ils nous apportent des solutions sur un plateau! »
et
« mais c’est qui ces cons d’étrangers qui veulent nous imposer une façon de faire qui n’est pas la notre? ».
(Bon, rappelons quand même que l’entreprise n’est pas une entreprise chinoise, c’est une joint-venture Franco-Chinoise, sous Management Français. Cocorico).
Quoi qu’il en soit, pour mieux faire passer la pilule, notre stratégie c’est de ne rien leur imposer, de ne faire que suggérer. Les chinois ne sont pas bêtes, comme tout le monde ils reconnaissent une idée qui leur est favorable et qui va les aider à progresser.
Contourner les problèmes au lieu des les affronter
## Lorsqu’un chinois ne sait pas comment répondre à une de vos demandes correctement, il préfèrera la squizzer, prétendre avoir oublié, ou tout simplement faire comme si la demande lui avait paru facultative. Il faut savoir être patient, et ne surtout pas chercher à prouver par A+B qu’il a fait une erreur.
>>>>> Mieux vaut faire du Management façon « la Preuve par l’action ». Quand un chinois te dit « c’est impossible de faire ce que tu m’as demandé! », inutile d’hurler, remonte tes manches, fais la chose par toi-même, réussi (tant qu’à faire), et conclue ensuite par « tu sais, si je te l’avais demandé, c’est que c’était possible de le faire » et rajoute « la prochaine fois que tu rencontres un problème, tu m’appelles, et on trouve une solution ensemble »
A vous qui avez déjà bossé avec des chinois, vous l’avez vécu comment ?
— Attention cet article ne prétend en rien être une analyse scientifique, rien n’est à prendre comme une vérité générale. —
Oulà, ça n’a pas l’air simple de travailler avec les chinois, il faut vraiment suivre les protocoles à la lettre …
J’ai déjà travaillé avec des Chinois, mais en temps que prof d’anglais et de français. De plus, j’ai eu des amis français qui faisaient plein de petits boulots.
Je ne vous donne donc que mon expérience là-bas, expérience d’un an à Chengdu, au Sichuan. En fait, je vais rester vivre en Chine, dans ce pays où je m’y plais plus qu’en France (ce n’est pas que je n’aime pas la France, juste que je préfère la Chine), et j’ai déjà trouvé un bon directeur de recherche pour mes études. Le message qui suit est là pour vous montrer l’état actuel du travail en Chine, au niveau des petits boulots.
Je vais donc commencer par les choses qui fâchent ^^
Une chose qui frappe : l’organisation !
En fait, en France, on a l’habitude d’envoyer le maximum d’informations que l’on peut, de prévoir les choses, ou autres.
A un grand mail ou message plein d’informations, et parfois plein de questions, on vous répondra à une seule des questions, et on vous redemandera parfois des informations que vous aviez bien envoyé dans le mail ou le message d’origine. A la plupart des questions, on vous répondra de voir sur place, de ne pas s’en faire, mais une fois sur place, on vous demandera pourquoi vous n’avez pas apporté tel ou tel truc.
On vous prévient du jour au lendemain, des fois on me prévenait seulement au moment où j’étais arrivé dans l’école que cela avait été annulé.
On vous dira parfois que l’on vous reverra un mail le lendemain auquel il faudra répondre, mais ils oublieront souvent de vous envoyer le mail, et diront en retour qu’ils attendaient que vous envoyiez d’abord un message.
Les petits boulots sont les plus sujets à être annulés à la dernière minute.
Ce qui m’a fait le plus « rire », c’est ce qui est arrivé à un copain qui sait faire de la batterie. Il avait trouvé une annonce, on lui répond d’abord qu’ils ne veulent prendre qu’un groupe. C’était pendant les fêtes de Noël, il fallait faire trois petites représentations pour des soirées chic. Et évidemment, pour trouver des musiciens pour Noël, ils n’ont mis l’annonce que fin novembre début décembre…
Puis quelques jours avant Noël, ils le recontactent et lui disent qu’il est pris, et qu’il doit réviser cinq chansons. Les cinq chansons étaient assez électro, quasiment sans batterie, et ils ont changé plein de fois de chansons, en ont rajouté le jour même…
Au final, 3 spectacles, mais dont deux qui ont été fait en playback (car il utilisait une batterie électrique), ceux à la guitare et au piano ne savait pas en jouer et ont tout joué en playback pendant les 3 spectacles. Ils ont pris ces deux personnes parce qu’ils n’avaient plus le choix.
Et les chansons passées durant le spectacle n’avaient quasiment rien à voir avec celles qu’on lui avait envoyé. Au final, avec ses 8 ans de batterie, ça n’a pas posé de problème, mais juste que l’organisation était terrible ^^
Ou encore en voyage dans le Sichuan avec la fac, on apprend la veille au soir qu’il faudra chanter en chinois devant 3000 Chinois venus assister à la plus grande fête tibétaine de l’année… J’ai cru à une blague jusqu’à ce qu’on nous emmène devant la scène, haha…
Je veux bien qu’en France, l’organisation ne soit pas toujours géniale, mais je trouve qu’on a touché des sommets en Chine. Ca laisse beaucoup de souvenirs, mais tout pourrait être évité rien qu’en anticipant…
Il y a beaucoup de choses que je trouve aberrantes aussi, notamment les salaires de 1500 yuans pour 35-40 heures par semaine… Entre ceux qui bossent comme des fous et ceux qui perdent leur temps car il n’y a pas de client, je trouve que rien ne mérite un salaire aussi bas pour être réquisitionné autant de temps… En fait, en Chine, on peut trouver un travail très facilement, vraiment facilement, par contre, le salaire ne suivra pas.
Pour les bons côtés, on peut voir le fait que tout est plus simple qu’en France. Moins de formalités administratives, ou alors s’il y en a, tout est rapide, ils ne s’embêtent pas avec toute la paperasse qu’on a en France.
Petit exemple : pour les visites médicales, en France, il faut trois jours pour tout faire, en Chine, seulement 1h30, et tu vas chercher tes résultats 2 jours après. Tout va plus vite et pour beaucoup de choses, on ne prend quasiment jamais de rendez-vous, on y va et on fait la queue, ce qui ne prend jamais trop longtemps.
On peut facilement être embauché du jour au lendemain, et ça peut arriver souvent si on est étranger (j’ai trouvé presque tous mes boulots de prof avec des gens rencontrés dans la rue).
Pour les autres bons côtés, c’est le fait que les Chinois veulent changer. Un de mes boulots était d’enseigner l’anglais à des enfants, et c’était une des mes profs de chinois qui m’avait recruté.
Elle voulait tout prévoir à l’avance, voulait planifier le contenu des cours, entre autres. Parfois même avec du zèle !
En bref, si vous êtes occidental, le côté un peu brouillon risque de vous gêner… Mais contrebalancer par l’accessibilité du travail obtenu.
Cela dépend les zones, à shanghai ou Pékin c’est beaucoup plus occidentalisé la manière de travailler… mais je pourrais dire travailler avec les français Oh my God, particulièrement en vacances, personne ne travaille tout le monde se fout de laisser son entreprise avec problèmes.
Bel article.
Pouvez préciser dans quelle ville vous officiez ?
Je partage totalement votre explication sur le souci de ne jamais perdre la face. Il y a une expression bien connu en chinois d’ailleurs sur cet état d’esprit.
Merci Alex ! Nous travaillons à Guangzhou. Comme le dit Yang, l’expérience serait sans doute différente si nous étions à Pékin ou Shanghai. Sois le bienvenu chez Rions Cantonais !
Hugo
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Je travaille depuis presque 3 ans avec des chinois sur la mise en place d’une unité de production et je suis régulièrement en Chine.
C’est vrai que c’est parfois assez folklorique et qu’il faut comprendre, en dehors des mots, où se trouve la réalité. En définitive, il vaut mieux tout vérifier par soi même, car un chinois ne dira jamais la vérité, si ça le dérange.
Par contre c’est un pays que j’adore et où tout semble encore possible. Les chinois sont de mon point de vue très optimistes par rapport aux français, et voient l’avenir devant eux.
Bonjour 🙂
Je passe sur cette publication plus de deux ans après sa mise en ligne…
Cet article est hyper intéressant, c’est la première fois que je pense à regarder sur Internet si d’autres personnes vivent la même chose que moi, non pas que j’en souffre mais… ça soulève des questions tout ça ! Et je suis étonnée de voir à quel point certaines caractéristiques reviennent, certains trait de caractère… Je me retrouve totalement dans ce texte, et également dans les commentaires. Vraiment.
Je travaille depuis un an dans une société Chinoise, nous sommes deux françaises uniquement, le reste des employés est Chinois, anglophone approximatif, et parfois avec un peu de chance ils papotent français, mais c’est très très limité.
Déjà qu’en France il peu y avoir des problèmes de compréhension entre Français (« ce que je veux dire, ce que je dis, ce que tu entends, ce que tu comprends » etc pour simplifier), mais alors là… La difficulté de compréhension est vraiment présente.
Je m’occupe du management relation clientèle, du SAV principalement (en B to C, avec des clients Français, Européens et anglophones parfois), mais je fais également du Community Management, de l’infographie, je gère les relations avec les partenaires, j’imagine les opérations marketing et promotionnelles pour les mois à venir, bref…
J’ai beaucoup de casquettes, profil idéal pour les entreprises lowcost, où un seul employé doit faire grossomodo 4 métiers différents au bas mot pour être rentable. Ça tombe bien, j’ai beaucoup de cordes à mon arc, et je rêvais de pouvoir toucher à tout puisque je m’intéresse à énormément de domaines. J’ai 24 ans, j’avais 23 quand j’ai commencé à travailler avec eux, la boîte avait deux semaines de vie, et je suis parfaitement consciente que ça n’aurais pas du tout pu fonctionner de la même manière dans une boîte française, bien établie qui plus est.
Bref, tout ça pour dire que c’est une aventure précieuse, avec son lot de difficultés comme toujours, mais qui m’enrichie jour après jour.
Navrée pour ce pavé, mais c’est la première fois que je m’exprime à ce sujet, avec des « inconnus » qui vivent la même chose.
A bon entendeurs (bon lecteurs ?), bonne journée à ceux qui passeront par là 🙂
Comment se fait-il que ce pays « ultra-libéral » où on fait travailler les enfants pour une poignée de riz, où les riches sont toujours plus riches et les pauvres toujours plus pauvres, viennent déverser ses milliards salvateurs sur le centre mondial de la morale et du socialisme justicier? Que dit la doctrine officielle française à ce sujet? Je m’interroge.
ok mes j ai 12ans
j ai teknique